Quand Rouen faisait battre le cœur de la fashion sphère

Creusant une vallée en boucle, depuis le nord-est jusqu'à l'ouest de Rouen où elle se jette dans la Seine, la rivière Le Cailly a fait la fortune des industriels de la région au XIXème siècle.

Le long de ce cours d'eau prospérait à l'époque une industrie textile fournissant de l'emploi à près de 100 000 personnes, avant de décliner et de s'éteindre à la fin du siècle dernier. Du temps de son activité florissante, ce faubourg de Rouen était surnommé la "petite vallée de Manchester" en référence à la ville anglaise, fleuron industriel du textile.

Classée monument historique, la Corderie Vallois à Notre-Dame-de-Bondeville, aujourd'hui transformée en musée industriel, a conservé en action sa grande roue à aubes et, dans ses murs à pans de bois restaurés, toutes ses machines parfaitement entretenues et huilées. À heures fixes, lors des visites, la machinerie s'allume et la fabrique s'anime comme aux grandes heures où s'y fabriquait des kilomètres de cordes tressées, de mèches à briquet et de passementerie.

En suivant le fil rouge "Fashion" pour cette escapade à Rouen, il y a, exposés à l'étage supérieur du bâtiment, des coupons de cotonnades imprimées de Normandie, reflets des plus belles heures de la production.

La fabrication de ces "indienneries" faisait de la région un des lieux les plus hypes de la mode de l'époque. Les épais catalogues et répertoires de motifs créés pour une fabrication locale témoignent du succès de ces imprimés inspirés des pièces de coton peint importées d'Extrême-Orient.

L'accessoire mode incontournable des Normandes était des carrés de coton à motifs qu'elles portaient noués sur les épaules pour changer facilement de mise avec une simple robe. Plusieurs pièces de vêtements sont exposées : mantelets à pans plongeants devant pour couvrir les jambes des cavalières, pelisses à capuche bordée de tissu froncé et petites robes en coton imprimé.

Le côté sombre de cette industrie textile en particulier, c'est l'utilisation de ces "indiennes" comme monnaie d'échange pour la traite négrière.

C'est à Elbeuf dans les faubourgs de Rouen que les grands couturiers du siècle dernier : Christian Dior, Guy Laroche, Lanvin, Hermès, Courrèges… se fournissaient en drap de laine chez Blin & Blin.

L'établissement occupait dans la ville un vaste périmètre de 12 km2 qui englobait les vastes bâtiments de la fabrique textile et les habitations des ouvriers.

La qualité du "drap d'Elbeuf" était telle que l'armée l'avait adopté pour la confection des casaques des soldats. Après la première guerre mondiale, le drap de laine exclusivement réservé au vestiaire masculin gagne la mode féminine. Les étoffes en lainage prennent des couleurs. Le tombé incomparable de l'étoffe de laine sublime le vestiaire des femmes.

Le drapier a mis fin à ses activités en 1976 faute de rentabilité suffisante. Un des bâtiments est reconverti aujourd'hui en Fabrique des Savoirs qui accueille un Centre d’archives patrimoniales, un Centre d'interprétation de l'évolution architecturale et urbaine et un musée riche de 45 000 œuvres, objets manufacturés ainsi que des collections privées d'animaux naturalisés.

Une salle des machines rassemble des exemplaires parfaitement conservés de l'équipement industriel utilisé à toutes les étapes de fabrication du drap de laine : traitement des toisons de laine, échardonnage, ourdissage, tissage…

À la Fabrique des Savoirs, sur le thème de la "Fashion", l'exposition "Drap de laine utile & sublime" montre de façon très didactique le processus de fabrication du drap de laine. Le parcours est émaillé de documents et de pièces de collections rares. Pour tout savoir sur une étoffe belle, chaude  et précieuse.

L'ultra modernité du drap de laine s'illustre à l'entrée de l'exposition par des créations de jeunes designers de mode lauréates et lauréats d'un concours sur le thème de l'étoffe de laine.
 

>>> La story de la mode à Rouen

>>> Les fabriques de la mode

>>> Informations pratiques

< Introduction